Après des décennies de délocalisations, un mouvement s’amorce et s’installe dans la durée. La relocalisation industrielle PME se confirme comme un levier stratégique pour maîtriser les chaînes d’approvisionnement, améliorer la qualité et reprendre la main sur l’innovation.
Portées par un contexte politique favorable et par des gains opérationnels concrets, de plus en plus de structures de taille intermédiaire réinvestissent le territoire. Nous analysons ce retour du fabriqué en France et ce qu’il implique pour vous, dirigeants de PME, qui envisagez le pas. Vous trouverez aussi l’éclairage d’un chef d’entreprise passé avec succès par la relocalisation.
Le ‘Made in France’ fait son grand retour dans les usines
Temps de lecture : ~8 min
- Relocalisation industrielle PME où en est-on en 2025
- Les ressorts politiques et économiques du retour du Made in France
- Interview – une dirigeante raconte sa relocalisation
- Avantages et contraintes pour une PME qui relocalise
- Relocalisation industrielle PME – les secteurs les plus dynamiques
- Feuille de route pratique pour réussir une relocalisation
- Mini FAQ
- Synthèse
Relocalisation industrielle PME où en est-on en 2025
Depuis 2020, la dynamique s’accélère. Plus de 115 relocalisations ont été recensées entre l’automne 2019 et la fin 2021, marquant une rupture avec la décennie précédente. En 2024, 115 nouveaux sites industriels ont ouvert leurs portes en France, dont 77 portés par des PME et des ETI. Cette réalité chiffrée contredit l’idée reçue selon laquelle seul un grand groupe peut relocaliser.
Le mouvement s’alimente aussi par la vague des startups industrielles. D’après l’observatoire Bpifrance, 97 % des jeunes pousses ayant levé des fonds en 2023 et 2024 produisent déjà en France. Les moyens suivent. Bpifrance a déployé 3,7 milliards d’euros pour l’industrialisation récente, dont 927 millions d’euros spécifiquement en faveur des startups, PME et ETI. Les régions se mobilisent également, à l’image de la Bretagne qui identifie un potentiel de 130 000 emplois et 5,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires relocalisables à l’horizon 2030, avec 3,9 millions de tonnes de CO₂ évitées.
Les chiffres clés à retenir
| Indicateur | Valeur |
|---|---|
| Relocalisations 2019–2021 | 115 |
| Sites industriels inaugurés en 2024 | 115 (dont 77 PME/ETI) |
| Startups financées 2023–2024 produisant en France | 97 % |
| Financement Bpifrance industrialisation | 3,7 Md€ (927 M€ pour startups, PME, ETI) |
Les ressorts politiques et économiques du retour du Made in France
L’environnement public a profondément changé. Le plan France Relance a fléché 850 millions d’euros vers des filières critiques comme la santé, l’agroalimentaire, l’électronique, les intrants essentiels et les réseaux 5G. Résultat concret : 477 projets soutenus, dont 311 portés par des PME, générant 3,2 milliards d’euros d’investissements et 50 000 emplois créés ou consolidés. De son côté, France 2030 consacre 54 milliards d’euros aux innovations de rupture, de l’hydrogène à la bioproduction en passant par l’électronique souveraine. L’essor deeptech se confirme, puisque 59 % des startups ayant levé en 2024 appartiennent à ces technologies de pointe.
Pour vous dirigeants, l’accès au financement et à l’accompagnement s’est densifié. Bpifrance, la Banque des Territoires et les agences régionales proposent des dispositifs couvrant financement, foncier, RH et soutien juridique. Le Prêt Nouvelle Industrie s’adresse aux entreprises qui créent ou modernisent un outil de production en France. Pour mettre ces aides en perspective avec le cadre macroéconomique, suivez l’évolution des choix budgétaires 2025.
Pourquoi les PME et ETI prennent la main
Trois moteurs dominent : reprendre la main sur le design produit pour optimiser la performance et intégrer plus vite les retours clients ; maîtriser la fabrication pour sécuriser qualité et traçabilité, un avantage commercial décisif ; et abaisser les tensions d’approvisionnement pour réduire délais et dépendance aux aléas internationaux. Exemple : une relocalisation de dispositifs médicaux en Normandie a créé une trentaine d’emplois et divisé par deux l’empreinte carbone transport en quatre ans.
Interview – une dirigeante raconte sa relocalisation
Pour comprendre le concret, nous avons échangé avec Claire Martin, dirigeante d’une PME de composants mécatroniques qui a rapatrié une ligne de production depuis l’Europe de l’Est vers l’ouest de la France. Pour découvrir d’autres parcours, explorez nos interviews sectorielles.
Q – Vous aviez externalisé depuis des années. Qu’est-ce qui a déclenché la relocalisation ?
R – Trois signaux : des ruptures d’approvisionnement répétées, une non-qualité en hausse et des délais clients non maîtrisés. Relocaliser nous a redonné du contrôle.
Q – Comment avez-vous abordé la décision financière ?
R – Nous avons simulé plusieurs scénarios sur cinq ans. Le coût horaire en France reste plus élevé, mais intégrant gains de productivité, rebuts évités, réduction des stocks et time-to-market plus court, l’équation devient favorable dès la troisième année.
Q – Quels investissements prioritaires ?
R – L’automatisation de tâches répétitives pour compenser le coût de la main-d’œuvre, et la montée en compétences via un plan de formation technique et qualité, financés par des aides régionales et un prêt industrie.
Q – Quelles difficultés non anticipées ?
R – La rareté des profils techniques, résolue en nouant des partenariats avec un lycée technique et un IUT local, et l’allongement de la phase d’homologation des fournisseurs.
Q – Bénéfices tangibles aujourd’hui ?
R – Le taux de retours divisé par deux, le délai de livraison réduit de 20 % et la capacité de lancer une nouvelle itération produit en quelques semaines, renforçant la relation client.
Q – Un conseil pour une PME hésitante ?
R – Ne relocalisez pas à l’identique : repensez votre process, digitalisez ce qui peut l’être, redessinez le produit, et pilotez le projet sur un volume limité avant déploiement complet.
Avantages et contraintes pour une PME qui relocalise
La relocalisation n’est pas un retour en arrière, c’est une transformation vers une industrie 5.0 qui conjugue automatisation, décarbonation et ancrage territorial. Les gains sont réels, à condition de piloter l’équation économique avec rigueur.
| Bénéfice clé |
|---|
| Qualité et traçabilité renforcées |
| Sécurité d’approvisionnement accrue |
| Innovation accélérée |
| Image de marque Made in France |
| Réduction de l’empreinte carbone transport |
Côté contraintes : le différentiel de coût de production demeure un frein, surtout sur des produits standardisés à faible valeur ajoutée ; la tension sur les compétences techniques est un sujet de fond ; la complexité administrative peut ralentir l’exécution ; enfin, certaines aides sont orientées deeptech, alors que de nombreuses PME traditionnelles visent la modernisation classique. L’appui des écosystèmes locaux et des dispositifs nationaux est stratégique.
Relocalisation industrielle PME – les secteurs les plus dynamiques
Les filières en mouvement incluent l’électronique, l’hydrogène, l’agroalimentaire alternatif et l’économie circulaire. Hexa Pinball a relancé la fabrication de flippers entièrement conçus et assemblés en France. SOS Accessoire a structuré un groupe intégré à 120 M€ de CA et près de 300 emplois en misant sur la réparation et l’allongement de la durée de vie. Neyret illustre l’alliance entre artisanat historique et haute technologie pour créer de la valeur mondiale depuis le territoire.
Ce dynamisme repose sur un investissement d’environ 2,3 % du PIB en recherche industrielle, visant produits à forte valeur ajoutée, process digitalisés et empreinte environnementale maîtrisée.
Feuille de route pratique pour réussir une relocalisation
Vous n’avez pas besoin de tout rapatrier en une fois. Une relocalisation réussie se construit en étapes avec une logique d’apprentissage progressif.
La checklist d’un projet bien mené
- Cadrer le périmètre et l’ambition avec un pilote simple à fort impact client
- Reconcevoir le produit pour l’industrialiser localement
- Cartographier les fournisseurs de proximité et prévoir des audits d’homologation
- Monter le plan de financement (fonds propres, dispositifs publics, prêts sectoriels)
- Investir dans l’automatisation et le digital
- Sécuriser les compétences clés via formation, alternance et partenariats écoles
- Définir des indicateurs clairs (qualité, OTD, productivité, bilan carbone) et une gouvernance mensuelle
Pour rester informés des tendances et opportunités réglementaires, suivez nos mises à jour éditoriales et nos dossiers spéciaux toute l’année dans la rubrique Actu.
Mini FAQ
Quelles différences entre relocalisation et réindustrialisation ?
La relocalisation industrielle PME rapatrie des activités externalisées à l’étranger. La réindustrialisation englobe la création de nouvelles capacités de production sur le territoire, avec ou sans délocalisation préalable.
Combien de temps pour réussir une relocalisation ?
Selon la complexité produit et les homologations nécessaires, comptez 12 à 24 mois entre décision et pleine cadence. Un pilote peut tourner en 6 à 9 mois.
Faut-il tout automatiser ?
Non. Ciblez les étapes à faible valeur ajoutée et répétitives pour libérer les compétences humaines sur l’assemblage critique, les contrôles qualité et l’amélioration continue.
Quelles aides mobiliser en priorité ?
France Relance, France 2030, dispositifs Bpifrance (Prêt Nouvelle Industrie), aides régionales et de la Banque des Territoires.
Synthèse
Le retour du Made in France s’enracine parce qu’il répond à des enjeux concrets : maîtrise de la qualité, sécurité des délais, innovation accrue et réduction de l’empreinte carbone. Les chiffres 2024–2025 confirment un mouvement porté par les PME et ETI, soutenu par un cadre public incitatif et des écosystèmes territoriaux mobilisés. À vous, dirigeants, de transformer cette dynamique en opportunité compétitive en bâtissant la bonne équation économique et une feuille de route réaliste.


